Un déplacement pour rien

Publié le par Lance

Après douze matches sans défaite, Lens s'est incliné hier au havre (0-2) et compte désormais cinq points de retard sur Metz, troisième. Ce n'est pourtant pas ce que retiendront les 1 237 supporters ayant fait le déplacement en Normandie. Comme à Beauvais trois semaines plus tôt, ils étaient nombreux à avoir profité de la programmation du match un samedi pour suivre leur équipe. Ils souhaitaient assister à un match de football et encourager leur équipe. Les choses ne se sont pas passées comme prévu.

Un déplacement pour rien

Une heure avant le match, l'ambiance était à la fête devant la porte G du Stade Océane. Pour une raison inconnue, l'accès permettant de pénétrer dans l'enceinte était encore fermé. Une longue file d'attente s'était formée dans laquelle les uns discutaient pendant que les autres chantaient. Vers 13h45, des membres des Tigers sont arrivés. Écartant les barrières, ils se sont placés dans les premiers rangs de la file. Au mégaphone, Jonathan, capo de la Marek, a expliqué qu'ils avaient été gazés par les forces de l'ordre. À la descente du bus, il semble que certains aient voulu se rendre en ville boire un verre. Les CRS les auraient alors empêchés de quitter le parking. Quelques dizaines de supporters munis de canettes auraient alors affronté des forces de l'ordre équipées, elles, de gaz lacrymogène et de flashball*.

L'incident semblait clos. Mais la longue attente devant l'entrée du stade et l'absence d'information a eu pour conséquence d'énerver des centaines de supporters, dont la plupart n'avaient pas été impliqués dans les incidents et n'y avaient d'ailleurs probablement pas assisté. Des stadiers et des CRS étant placés derrière une porte qui ne s'ouvrait toujours pas, des chants ont commencé à monter ("on veut rentrer !") puis des sifflets se sont faits entendre avant que des coups de pieds soient donnés dans la porte d'entrée, "démolie" selon un journaliste de La Voix du Nord. Le capo de la Marek a demandé à chacun de rester calme en attendant que la porte soit ouverte.

Un déplacement pour rien

À 14h02, les premiers supporters ont enfin pu pénétrer dans le stade. Selon un responsable de la sécurité du HAC, le préfet avait décidé en représailles aux incidents ayant opposé quelques dizaines de personnes aux forces de l'ordre de n'autoriser aucun supporter à entrer dans la tribune visiteurs et de laisser 1 237 personnes sur le parking jouxtant le stade. Pendant toute l'après-midi ? Il a finalement changé d'avis alors que les joueurs des deux équipes étaient déjà en train de s'échauffer.

Un déplacement pour rien

Est-ce parce que la grande porte avait été endommagée que les fans du RCL ont dû passer par une petite ? En vingt-huit minutes, 1 237 personnes agglutinées dans une file d'environ trois mètres de large devaient passer par une porte d'environ un mètre de large devant laquelle étaient positionnés un CRS et un stadier du RCL pour fluidifier l'accès. L'effet entonnoir était obligatoire. Seul élément pour assurer la sécurité des uns et des autres : ce stadier qui demandait de ne pas pousser et de faire passer le message ! Hommes comme femmes, personnes âgées comme enfants, personnes handicapées comme valides, tout le monde était compressé dans une même file et emporté par un mouvement de foule qui aurait pu provoquer une catastrophe si les supporters ne s'étaient pas montrés raisonnables. Certains ont choisi de passer au-dessus des barrières pour quitter le danger dans lequel ils étaient, quitte à entrer plus tard dans le stade.

Avoir autorisé si tard l'accès au stade relève de l'inconscience et de l'irresponsabilité. Il s'agit d'une décision contraire à la "recommandation [faite par la Ligue et le ministère de l'Intérieur après les attentats du 13 novembre] d’arriver le plus tôt possible au stade pour fluidifier les contrôles et minimiser les files d’attente." Grande ou petite porte, peu importe : il y avait dix stadiers pour effectuer en vingt-huit minutes les fouilles et les palpations (normalement renforcées suite aux attentats) sur 1 237 personnes. Soit un temps de contrôle d'environ treize secondes par spectateur ! C'était évidemment impossible. Les contrôles se sont donc révélés plus légers que d'ordinaire et la précipitation gagnait des supporters souhaitant logiquement assister au début de la rencontre.

Un déplacement pour rien

À 14h30, les joueurs lensois ont débuté le match alors que beaucoup de supporters n'avaient pas encore pu prendre place dans la tribune visiteurs. Aucun chant n'a été lancé. Pas même la Lensoise. Le cœur n'y était pas et beaucoup étaient choqués par ce qu'ils avaient dû subir pour pénétrer dans une enceinte sportive. Certains, stupides, ont malheureusement fait le choix de la violence. 85 sièges ont été cassés, voire jetés sur la pelouse (un morceau de siège a blessé un stadier). Les toilettes des hommes comme des femmes ont été endommagées. Au total, 200 personnes auraient été identifiées et pourraient prochainement être arrêtées. Les fautifs présents en tribune visiteurs devront être sanctionnés. Ceux qui étaient chargés d'assurer la sécurité des supporters mais les ont en fait mis en danger devront également s'expliquer.

Lance

* Les Tigers dénoncent des "abus policiers" et recueillent des témoignages. Des commentaires déposés sur les réseaux sociaux dénoncent le comportement des forces de l'ordre qui s'en seraient pris à des supporters (notamment des femmes et des enfants) n'ayant commis aucun acte illégal.

Vous pouvez lire d'autres témoignages dans l'article L'impression d'être des chiens, des bêtes sur le site Bollaert mécanique.